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L'élection à la présidence de la communauté de communes : le camouflet pour Christophe Chabot

 Chapître : Le temps des élections (2020)

3 - L'élection à la présidence de la communauté de communes : le camouflet pour Christophe Chabot


La communauté de communes du Pays de Saint-Gilles-Croix-de-Vie comptait 48 sièges qui allaient être pourvus par les nouveaux conseillers élus lors des élections municipales. 

La répartition des sièges tenait compte de la population de chaque commune. Ainsi, Saint-Hilaire-de-Riez disposait de onze sièges, Saint-Gilles-Croix-de-Vie en avait sept, quatre pour Bretignolles-sur-Mer et Le Fenouiller, trois pour Brem-sur-Mer et Commequiers. L’Aiguillon-sur-Vie, La Chaize-Giraud, Coëx, Givrand, Landevieille, Notre-Dame-de-Riez, Saint-Maixent-sur-Vie et Saint-Révérend en avaient deux chacune. 
Il était clair que le résultat des élections municipales à Saint-Hilaire-de-Riez, avec un changement de majorité municipale, allait avoir un impact sur l'élection du président de la communauté de communes.





Le 10 juillet 2020 était le grand jour : qui de Christophe Chabot ou de François Blanchet allait être élu président de la communauté de communes du Pays de Saint-Gilles-Croix-de-Vie ? 

De nombreuses personnes, partisanes ou opposantes au projet de port de plaisance de Bretignolles, avaient fait le déplacement sachant que l'enjeu était l'avenir du projet.

Avant l'élection proprement dite, chaque candidat avait dix minutes pour défendre sa candidature devant les élus communautaires.

Le premier discours était celui de Christophe Chabot :

« Moment de vérité tant attendu
Ce soir vous allez devoir départager non pas deux projets parce que François et moi n'avons pas des visions si éloignées de notre territoire mais deux méthodes, deux sincérités différentes. Quand François m'a annoncé sa candidature, j'ai d'abord pensé m'effacer pour ne pas risquer de fracturer notre territoire. Le manque d'élégance et la réaction de mes collègues m'ont encouragé à me porter jusqu'à vous ce soir. J'ai rencontré beaucoup de nouveaux élus et je pense qu'il y a une façon de sortir par le haut de cette situation. Le temps imparti par notre président ne permet pas de faire le bilan de ces dix années, ce bilan vous le connaissez, il est simple, on a tout réussi. Dans une ambiance exceptionnelle d'amitié et de partage, avec une équipe non politisée, nous avons réalisé l'ensemble de notre ambitieux programme. Notre communauté de communes est cité en exemple sur sa gestion, son fonctionnement, ses compétences. Dans tous les domaines, nous possédons les meilleurs ratios du département. Sur les dix dernières années, nous sommes l'intercommunalité qui a le plus construit de nouveaux équipements dont 150 millions d'euros sur Saint-Hilaire-de-Riez et Saint-Gilles-Croix-de-Vie, avec la plus basse fiscalité du département, un bon bilan dont nous pouvons être fiers et, chers collègues, nous avons fait du bon boulot.
En ne participant à aucune, je dis bien, des 1000 commissions qui ont animé ce bilan, je vous ai confié de vrais responsabilités. En validant 99% de vos propositions, j'ai respecté votre travail et l'engagement que j'avais pris de n'être que le coordinateur de votre action.Je dis cela pour justifier une nouvelle gouvernance, le bruit a couru cette semaine que je décidais tout seul. Merci du compliment en fait car si j'ai décidé seul de ce qui vient d'être fait, depuis dix ans dans notre pays, il n'y a pas photo, il faut continuer avec moi.
Je n'ai pas le temps non plus de vous parler du joli coup de billard à deux bandes mis en place, de longue date, par François pour se débarrasser de ses deux amis, Laurent et moi-même, je dirai c'est du bel ouvrage. Lui vous dira en souriant, c'est la démocratie et il a raison, pour cruelle qu'elle soit c'est la démocratie, je préciserai amicalement que c'est sa démocratie.
Tournons nous plutôt vers l'avenir, toujours pour des raisons de temps, je ne peux évoquer notre programme et je le regrette. Vous le savez, un long travail nous attend et il n'est pas nécessaire, selon moi, de perdre les deux premières années du mandat à écrire un projet de territoire, érigé à prix d'or par des cabinets parisiens qui décriront, dans deux ans, ce qu'il faut faire, c'est à dire ce que nous proposons. Au sortir de la crise Covid, il y a une urgence, si je suis élu, nous nous mettrons au boulot pour faire ce que l'on a décidé tous ensemble. Et s'il faut remettre en cause certains projets, nous le ferons également avec méthode, respect du passé et de l'avenir.
J'y arrive.
Malheureusement, la campagne s'est focalisée sur un seul thème, le port de Bretignolles, je le regrette bien, au vu des défis qui nous attendent, il y avait probablement mieux à faire. Sur la réputation sulfureuse du projet de port de Bretignolles, mon ami François a décidé de sacrifier ce dossier sur le thème de ses ambitions. En fait le port de Bretignolles et son image lui offrent une fenêtre de tir sur un temps très court pour avoir l'opportunité et donc le prétexte. François a toujours soutenu le port, il a toujours voté tous les budgets et sait que le dossier est consolidé, il refuse la proposition que je lui ai faite de laisser le temps aux élus de l'ouvrir, il prétend qu'ils n'en veulent pas. Au vu de ce qu'ils ont vu ou entendu, c'est pas surprenant, nous aussi nous ne voulons pas du port que François décrit comme étant un futur gouffre financier, m'obligeant à vous adresser hier soir quelques précisions. Je le rejoins sur un point important, la donne démographique a changé, le PSG comme nous l'appelons entre nous, le Pays de Saint-Gilles compte 28 nouveaux élus qui doivent être entendus, pour moi il n'y a aucune ambiguïté. Désormais, c'est à eux de décider de ce qui est bien pour notre territoire et de ce qui ne l'est pas. Cela doit se faire avec une méthode et respect en tenant compte de la volonté des électeurs, je n'ai jamais eu d'autre conception de la démocratie. C'est pourquoi j'ai proposé la création d'une commission dédiée composée des dix nouveaux maires et des deux nouveaux élus qui ont toujours affiché une opposition au projet de port. Elle devra, sur une période de 6 mois, étudier ce dossier, auditionner les parties pour ou contre, consulter les entreprises, voir ou revoir les experts sur certains sujets. En parfaite indépendance, cette commission et uniquement cette commission devra proposer des solutions acceptables pour tous, elle aura le pouvoir d'y mettre un terme définitif, elle pourra le faire à tout moment sur cette période. Je précise que je n'y participerai pas pour mon plus grand bonheur. Peut-on faire plus clair et plus loyal, je ne pense pas, c'est la démocratie que j'aime.
J'appelle mes collègues à ne pas confondre avis de citoyen et responsabilité d'élu. L'avis de citoyen et même souvent de la vox populi, des amis, des réseaux sociaux, de la presse, chacun conviendra qu'il est souvent très partisan et peu documenté. La responsabilité de l'élu, c'est de prendre un peu de hauteur, d'ouvrir le dossier, de l'étudier, de vérifier si les infos sont bonnes et la légitimité du parcours démocratique. Une fois que l'on a fait cela et uniquement après, l'élu décide. De toute façon on ne pourra pas faire autrement. Si le futur président ne met pas en place une méthode respectée pour sortir de ce dossier sans blesser, nous courrons à la division. 
Jamais les Bretignollais ne laisseront saborder 20 ans de participation citoyenne, des millions d'euros dépensés, des années de sacrifice, de sueur, de joie et de peine. En procédant de la sorte , vous ne ferez que remplacer la colère des opposants par celle de ceux beaucoup plus nombreux qui soutiennent ce dossier. Jamais les anciens élus n'accepteront d'être déjugés violemment. Autant, mes chers collègues, sans l'avoir ouvert, refermer ce dossier d'un revers de main pour satisfaire de petits arrangements électoraux !
Croyez-vous que les entreprises du Pays de Saint-Gilles qui travaillent, pour certaines, depuis 15 ans sur ce dossier et ont dépensé des centaines de milliers d'euros vont accepter un moratoire où chacun sait qu'il signerait l'arrêt de mort du dossier ?
A l'aube d'une crise économique sans précédent, stopper un tel projet, de manière arbitraire, est-il une façon de soutenir l'emploi ?
Si l'avis est majoritaire pour abandonner le projet, êtes vous sûr que le maire de Saint-Gilles, qui souhaiterait engager 12 millions d'euros communautaires dans son port est mieux placé ?
Mesdames et messieurs, si ce dossier doit se refermer, je le refermerai, c'est à moi et à personne d'autre de le faire. Je dispose de la confiance de 4000 adhérents de "Bretignolles Veut Son Port", je suis prêt, ma décision est prise. Je suis disposé à mettre un terme à ce projet qui divise, et passez-moi l'expression, qui bousille ma vie et celle de ma famille depuis trop longtemps. L'arrêter sera un soulagement, la fin d'un cauchemar personnel. Si vous me confiez cette mission, je la remplirai sans état d'âme et avec bienveillance, c'est à moi de rencontrer les conseillers municipaux des 3 mandats qui ont construit ce projet, de leur expliquer pourquoi vous avez pris cette décision. Mon seul objectif désormais, c'est d'éviter la division et de refermer ce dossier dignement. François va vous dire que lui aussi il fera pareil, il sera bienveillant sur la méthode, on peut lui faire confiance, on vient de le vivre, les méthodes douces il connaît.
Mesdames et messieurs, il n'y a qu'à moi que les Bretignollais pardonneront, ce soir la question à laquelle vous devez répondre : qui de François ou de Christophe est le plus légitime pour fermer ce dossier sans diviser le pays. Je vous demande solennellement de me confier cette mission, c'est mon devoir, c'est ma démocratie.
J'en termine à présent. J'ai organisé ma succession à Bretignolles pour envisager m'investir à la communauté de communes qui demande toujours plus de présence. Si vous votez pour moi, libéré de ma fonction de maire et du dossier de port, sans aucune autre ambition politique, je viendrai vers vous, avec vous, dans vos communes, pour faire mieux connaître notre collectivité, mon travail sera celui d'un homme de terrain. Avec les dotations financières que nous modifierons, j'irai, dès la semaine prochaine, valider de nouveaux projets sur les communes du rétro-littoral. 
Mesdames et messieurs, dans quelques minutes il y aura un vainqueur, quel qu'il soit, notre beau pays qui vient de vivre un mandat fabuleux, sera le grand perdant de cette soirée, j'en suis désolé mes amis. Dès demain, il faudra panser les plaies. Si je gagne, je m'emploierai à recoller les morceaux d'une histoire coupée en deux, je ne laisserai personne en chemin. A vous les Hilairois, je tendrai la main dès lundi, j'ai bien compris que Jean-Yves et mes amis de Saint-Hilaire avaient changé d'alliance mais moi je n'ai pas changé vis à vis de Saint-Hilaire-de-Riez et j'ai gardé la mémoire le jour où ensemble, il y a 14 ans, sous l'impulsion de Jacques Fraysse, rassembleur, vous m'avez confié la mission d'unir nos deux communautés et de veiller à la longévité de cette union, tu y étais Jean-Yves, tu y étais Chantal. La loyauté et la fidélité, c'est ma démocratie. Je ne laisserai pas Saint-Gilles en chemin, à 60 ans, désormais apaisé, je possède la sagesse et le soutien pour pardonner, les élus de Saint-Gilles sont mes amis d'hier et ils seront ceux de demain. Il n'y pas d'autre option pour la sérénité et la réussite de notre beau pays de Saint-Gilles-Croix-de-Vie.
Je vous remercie »

François Blanchet, au cours de son discours s'était posé en rassembleur évoquant « une nouvelle méthode de gouvernance que nous élaborerons tous ensemble » avec le souhait de tourner la page : « nous devons revoir nos priorités pour appréhender le monde de demain. La crise sanitaire nous oblige à réinventer notre projet de territoire ».
Dans une partie de son discours, il avait marqué sa différence avec Christophe Chabot et avait abordé le projet de port de plaisance de Bretignolles en y consacrant peu de temps comme s'il voulait démontrer qu'il n'était pas le sujet majeur, d'intérêt général, au Pays de Saint-Gilles-Croix-de-Vie : « je ne serai pas le président du littoral, je serai le président des 14 communes du Pays de Sain-Gilles-Croix-de-Vie et jamais, au grand jamais, je ne privilégierai certaines villes par rapport à d'autres. Il n'y aura pas de guerre entre le rétro-littoral et le littoral, il n'y aura pas de conflit entre les communes rurales et celles de la côte. Je serai le président de tous sans favoriser personne mais en aidant chacun de façon équitable, j'en prends l'engagement devant vous ce soir … 
Par le passé, j'ai toujours soutenu le projet de port de plaisance de Bretignolles-sur-Mer, comme l'a dit Christophe, j'ai toujours voté en sa faveur. Je pense que nous devons désormais, tous en conscience, revoir nos priorités. Il me paraît aujourd'hui trop hasardeux d'engager plusieurs dizaines de millions d'euros dans cet unique projet. Je pense très sincèrement que nous devons prendre le temps de la réflexion pour nous recentrer sur l'intérêt général, pour accompagner nos entreprises sinistrées par la crise, pour être aux côtés de nos habitants et pour soutenir les plus fragiles. La crise sanitaire, on le voit bien, se transforme en crise économique et sociale dont on ne peut pas encore évaluer l'ampleur. Nous ne pouvons pas faire comme si rien n'avait changé. Je proposerai donc au conseil communautaire d'adopter un moratoire sur le port de plaisance de Bretignolles-sur-Mer, d'attendre le résultat des recours avant d'aller plus loin. Si les élus le souhaitent, nous pourrons également organiser un référendum dans les 14 communes du Pays de Saint-Gilles-Croix-de-Vie »

Lors du vote des élus communautaires, François Blanchet avait obtenu la majorité absolue avec 26 votes, ce qui avait été reçu comme une délivrance par tous les opposants à Christophe Chabot et comme un choc par tous ses partisans.

François Blanchet était donc le nouveau président de la communauté de communes du Pays de Saint-Gilles-Croix-de-Vie.



Les médias locaux avaient donné la parole aux deux candidats pour une réaction immédiate après l'élection.

Christophe Chabot : « ce soir, j’ai la réaction d’un homme qui s’était préparé, qui avait compris depuis quelques jours quel serait le résultat. En réalité, je suis soulagé que tout ce cirque s’arrête pour moi, je sais me battre contre mes ennemis, mais pas contre mes amis. Cela sonne comme une fin de parcours et je vais probablement arrêter. Tout le monde s’est focalisé sur le projet de port, mais si l’on regarde l’ensemble des réalisations accomplies depuis 10 ans sur le Pays de Saint-Gilles, je peux partir la tête haute, sans rancune et sans amertume. Il faut laisser la place aux jeunes. Quand vais-je me retirer ? Je vais poser la question aux élus de Bretignolles, je prendrai ma décision en concertation avec eux » 

François Blanchet : « je suis très heureux, nous allons pouvoir partir sur un nouveau projet de gouvernance intercommunale. La campagne a été difficile, mais maintenant, nous allons panser les blessures, et pouvoir travailler dans un climat sain et apaisé avec les quatorze communes. Nous devons tenir une réunion de bureau (le 23 juillet) et un conseil communautaire (le 30 juillet) avant la pause estivale, puis nous reprendrons les dossiers de plus belle dès début septembre. Concernant le port de Bretignolles, quelle que soit la décision finale, nous devons avoir réglé le problème dans une année. » 

A cet instant, la stratégie de Christophe Chabot s'effondrait. 
Il avait distribué les rôles, Frédéric Fouquet à la mairie de Bretignolles et lui à la présidence de la communauté de communes du Pays de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, pour garder tous les pouvoirs sur le territoire et pour mener à terme son projet de port de plaisance de Bretignolles-sur-Mer. 
Son pari avait échoué et il n'était plus qu'un simple conseiller municipal et communautaire, ce qui était une véritable humiliation pour lui. 
Qu'allait-il faire désormais ?

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